Illia Zabarnyi, officiellement recruté par le PSG, va partager le vestiaire parisien avec le gardien Russe Matvey Safonov alors que les deux pays continuent de s’affronter en Ukraine. Leur entente dans le groupe interroge forcément.
L’arrivée d’Illia Zabarnyi, qui a signé ce lundi son contrat avec le PSG, devrait régler quelques problèmes en défense pour le club de la capitale. L’ancien joueur de Bournemouth est appelé à suppléer notamment Marquinhos cette saison. Mais dans le vestiaire, son recrutement peut-il être source de problèmes, voire de tensions? L’Ukrainien de 22 ans va intégrer un effectif où figure le Russe Matvey Safonov et alors que l’invasion de l’Ukraine par la Russie se poursuit, la cohabitation entre les deux pose question, en attendant de voir comment ils se comporteront. Une chose est sûre, Illia Zabarnyi avait clairement exprimé au Times, fin 2023, son engagement pour son pays: « Lorsque la guerre a éclaté, j’ai donné beaucoup d’argent pour notre armée, pour notre peuple, pour mes amis qui partent à la guerre et défendent notre pays. Nous aidons simplement leurs familles, car elles sont seules. J’ai de la nourriture, un logement, la sécurité, et d’autres n’en ont pas. Je dois aider. » Le défenseur central ajoutait qu’un ami d’enfance avait été touché directement au front, ce qui lui donnait encore plus envie de représenter sa nation.
Scruté de près par les Ukrainiens
Impossible, alors, d’imaginer que Zabarnyi n’ait pas pensé au fait de devoir composer avec le gardien russe au quotidien. Garçon bien élevé, il y a très peu de chance de le voir prendre position publiquement sur cette relation. Mais en Ukraine, le sujet est brûlant et la pression intense. « C’est un sujet principal depuis janvier et les premières rumeurs sur sa venue à Paris », confirme Andrew Todos, journaliste anglo-ukrainien spécialiste du championnat anglais. « Ce sera intéressant de voir comment ça va se passer. Il a une très grande réputation en Ukraine. Il a l’image d’un gars propre, qui ne boit pas, n’a jamais fait les gros titres. Il joue juste bien sur le terrain et tout le monde l’aime pour ça. Mais il faudra surveiller s’il n’y a pas de camaraderie entre les deux car vraiment, s’il y avait une photo entre eux ou si on les voit en train de parler ensemble à l’entraînement, je pense qu’il y aura vraiment des gens en colère en Ukraine. »
On peut le croire. Après recherches, nous n’avons pas trouvé de cas de cohabitation similaire hormis en 2022, juste après le début de cette guerre. Le milieu ukrainien Ruslan Malinovslkyi évoluait avec le Russe Aleksey Miranchuk à l’Atalanta Bergame. Le premier avait dû s’excuser publiquement auprès de ses compatriotes car il avait été vu en train de parler et célébrer avec son coéquipier de l’époque. Malinovsky s’était aussi retrouvé en pleine polémique quand il avait serré la main du Monégasque Alexandr Golovine, international russe, lors d’un match avec l’OM.
L’exemple Malinovskyi
« Mais j’espère que Zabarnyi ne fera pas ça, on verra », souffle Andrew Todos. « J’ai lu différents articles et le consensus général est que ça a été un point important dans sa réflexion. Je pense que Zabarnyi est beaucoup plus sensible sur ce sujet, d’autant que ça fait presque quatre ans que l’invasion a eu lieu. Il sera plus attentif à ce genre de choses. » Les publications et les photos du PSG sur les réseaux sociaux seront donc à scruter de près. Car chaque geste, on l’a compris, peut être source de problème pour les sportifs.
La joueuse de tennis ukrainienne Yelyzaveta Kotliar avait été critiquée par sa fédération pour avoir salué son adversaire russe lors de l’Open d’Australie junior 2024. En tennis toujours, l’Ukrainienne Marta Kostyuk, elle, n’avait pas serré la main d’Anna Blinkova en mars dernier, deux ans après avoir déclaré forfait contre Mirra Andreeva en raison du contexte géopolitique. L’escrimeuse Olga Kharlan avait de son côté été disqualifiée des Mondiaux cette année pour ne pas avoir salué son adversaire russe…
« En Ukraine, il ne faudra pas qu’il y ait quoi que ce soit entre les deux, un échange, une discussion », appuie Andrew Todos, en revenant sur les deux joueurs du PSG. « Surtout que Safonov est membre de la sélection nationale, considérée comme une extension de l’Etat Russe. Je pense que Zabarnyi le sait, mais que cette opportunité de venir à Paris était trop grande pour la refuser. »
« J’espère qu’ils pourront se serrer la main »
En Russie, on donne moins d’importance à la situation. « Je tiens à dire qu’en Russie, nous sommes tous convaincus que le sport doit transcender la politique », pose Mike Trofimov, journaliste russe pour Match TV-Chanel. « Dans certains sports, nos athlètes rivalisent encore avec les Ukrainiens, leurs relations ne sont peut-être plus aussi chaleureuses qu’avant, mais ils se respectent mutuellement. »
Localement, certains médias semblent néanmoins avoir relayé des déclarations de l’entourage de Zabarnyi qui demanderaient le départ de Safonov. Des prises de positions infondées mais auxquelles tient à réagir Mike Trofimov, preuve de l’importance symbolique de ce transfert. « Nous avons été choqués! Je ne l’ai pas entendu dire de telles choses personnellement, mais je pense que tout ce mouvement vient de son entourage. Écoutez! Cela semble insensé. » Et de conclure: « A ma connaissance, Matvey n’a jamais commenté cette affaire. En Russie, nous sommes restés calmes quant au transfert de Zabarnyi au PSG. J’espère que les deux joueurs pourront se serrer la main publiquement et dire qu’ils sont au PSG pour jouer au football, pas pour faire de la politique. » On y verra plus clair dans les prochains jours… Pour le moment, ni l’entourage de Matvey Safonov ni le PSG n’ont répondu à nos sollicitations sur le sujet.
