Mason Greenwood n’est pas qu’un prodige de plus. Autre homme fort de la renaissance de Manchester United, l’attaquant de 18 ans se démarque par un redoutable sens du but et, surtout, une aisance des deux pieds qui lui permet de faire la différence.
Depuis peu, il faut accorder bien plus de crédit aux Britanniques lorsqu’ils font l’éloge de leurs « wonderkids ». Parce que les derniers exemples ont été plutôt convaincants – Jadon Sancho, vous connaissez ? – et que l’Angleterre a démontré, lors de la dernière Coupe du monde, qu’elle avait bouché son trou générationnel. Ces dernières semaines, le Royaume s’est trouvé un nouveau chouchou : Mason Greenwood. À 18 ans, le prodige de Bradford est l’un des hommes du redressement de Manchester United. S’ils s’imposent devant Southampton, ce lundi soir (21h00), les Red Devils monteront sur le podium de Premier League pour la première fois depuis… la première journée.
Pour enclencher son étonnante remontée, le club mancunien avait dû se dégoter un maître à jouer, à savoir Bruno Fernandes. Il s’est aussi trouvé un buteur. Un vrai. Ole Gunnar Solskjaer n’est pas Britannique mais il connaît suffisamment le Royaume pour s’emporter. « Greenwood est l’un des meilleurs – sinon le meilleur – finisseurs avec lesquels j’ai travaillé, disait le manager de Man U après le large succès des siens (5-2) devant Bournemouth. Que ce soit en match ou à l’entraînement, ou même dans son jardin, il sait comment marquer. » Lors des trois dernières sorties des Red Devils, le jeune attaquant a inscrit quatre des onze buts de son équipe. Le tout sans occuper la pointe de l’attaque, réservée à Anthony Martial.
C’est ce qui fait sa particularité : Greenwood n’est pas seulement l’un de ces jeunes ailiers, vifs et capables de faire des différences sur un côté, qui incitent les plus grands clubs européens à miser des dizaines de millions d’euros sur eux. À 18 ans, l’international Espoirs anglais fait déjà ce que la plupart des joueurs de sa génération mettront plusieurs mois à réaliser, au mieux. D’ailleurs, parmi les plus grands talent du Vieux Continent évoluant à un poste similaire et âgés de 20 ans ou moins, il est l’un de ceux qui cadrent le plus. Outre Rodrygo, trop peu aligné cette saison pour offrir un véritable échantillon de comparaison, seul Jadon Sancho, plus expérimenté et un peu plus « vieux », présente un taux de précision plus élevé que son compatriote (64% de tirs cadrés contre 63% pour Greenwood).
Joueur | Tirs | Tirs cadrés (en %) | Tirs du pied « naturel » (en %) | Buts |
Mason Greenwood | 51 | 63 | 65 | 14 |
Ansu Fati | 31 | 55 | 68 | 7 |
Rodrygo | 24 | 65 | 54 | 6 |
Gabriel Martinelli | 24 | 57 | 58 | 6 |
Vinicius | 40 | 59 | 80 | 4 |
João Felix | 82 | 43 | 71 | 8 |
Jadon Sancho | 70 | 64 | 91 | 19 |
Dejan Kulusevski | 45 | 34 | 76 | 7 |
Le sens du but du gamin de Man U, vanté par Solskjaer et bien d’autres – la presse britannique le compare déjà à Owen ou Fowler – ne suffit pas à justifier son aisance. Car Greenwood a un autre don, probablement encore plus précieux. « Il sent le jeu, il tire du pied droit et du pied gauche, soulignait son coéquipier Jesse Lingard auprès de Sky Sports. Encore aujourd’hui, je ne sais pas quel est son pied naturel ! Il marque des coups francs directs du pied gauche, tire des corners avec le droit…«
Dangereux dans la surface, précieux pour son coach
Cette qualité-là est redoutable. D’abord parce qu’elle lui permet d’être dangereux dans n’importe quelle position. Face à Bournemouth, il avait d’abord trouvé la faille depuis le côté gauche, en frappant avec son pied le plus utilisé. Puis il avait calqué son but à l’exact opposé, cette fois-ci du pied droit. Pour tromper le portier de Brighton, il avait ouvert son pied gauche en arrivant lancé depuis l’aile droite. Et à Aston Villa, il avait allumé une mèche à l’entrée de la surface. Du droit.
Cette particularité est aussi un casse-tête pour les défenseurs, incapables de savoir sur quel pied danser pour l’arrêter. Et dans la surface, l’imprévisibilité de Greenwood lui offre un avantage considérable. Parmi les meilleurs jeunes talents ayant tenté leur chance à plus de 30 reprises cette saison (championnats domestiques et Coupes d’Europe confondus), aucun n’a autant utilisé son « mauvais » pied que lui.
65% des tirs du Mancunien l’ont été du pied gauche. À titre de comparaison, Jadon Sancho (91%) ou Vinicius (80%) utilisent quasi exclusivement le pied avec lequel ils sont le plus adroit. En cela, Greenwood est une bénédiction pour Solskjaer. Avec lui, le Norvégien peut inciter son attaque, aussi composée d’Anthony Martial et Marcus Rashford, à multiplier les permutations et ainsi semer la pagaille dans la zone de vérité. Seizième défense de Premier League, Southampton a du souci à se faire. Elle pourrait, elle aussi, avoir le tournis.